Art de vivre antique : les banquets

Si les gaulois ont adopté facilement les habitudes romaines c’est que rien d’équivalent n’existait chez eux. Nos ancêtres celtes étaient d’usages un peu plus « barbares » et moins raffinés, disons moins urbains, moins civilisés.

Mais il faut avoir à l’esprit que le même processus a eu lieu chez les romains eux mêmes : beaucoup d’historiens nous disent que leur civilisation n’est qu’une continuité de celle des grecs qu’ils admiraient et dont ils détournèrent la plupart des coutumes voire des dieux, sous de nouvelles appellations. A l’époque de la Grande Grèce qui comportait par exemple la région du sud de l’Italie, les villageois, éblouis, se mirent d’eux mêmes à apprendre le grec, à jouer du théâtre, à adopter leurs coutumes. Et on voit encore en 2017 certains villages du sud de la péninsule qui continuent à pratiquer le dialecte grec et à conserver les coutumes de la vie courante de leurs voisins hellènes [vécu].

Les banquets antiques, grecs, étrusques ou romains, prônaient le plaisir dans la convivialité et le partage. Ils étaient aussi des lieux d’échange et de pouvoir.

Ces banquets font l’objet actuellement d’une étonnante présentation au musée d’archéologie méditerranéenne de la Vieille Charité à Marseille jusqu’à fin juin 2017. Les photos ci dessous en sont issues.

Chez les grecs

  • A leur menu :

Céréales : orge, blé, froment, pavot.

Légumes : céleri, fenouil, poireau, fève, salades, olives, champignon, choux, concombre, carotte, asperge, artichaut, blette, panais, carde, radis.

Viandes : chèvre, pigeon, veau, lapin, caille, poulet, mouton, cerf, porc, agneau, canard, loir, sanglier, perdrix, tourterelle, vache, lièvre, pintade.

Poissons : seiche, crevette, loup, cabillaud, thon ou pélamide, murène, raie, dorade, rascasse, mulet, turbot, rouget, serran, morue, calamar, congre, anguille, sole.

Coquillage : huîtres, moules, oursins.

Fruits : mûre, pignons, pêche, prune, raisin sec, poire, noix, figue, pomme, amande, grenade, raisin, baie de myrte, coing, pruneau, abricot, noisette.

Condiments : garon, graine de moutarde, vinaigre, romarin, cumin, persil, oignon, câpres, poivre, fleur de mauve, safran, laurier, cerfeuil, sel, carthanne, menthe, sarriette, origan, ail, coriandre, aneth, basilic, laser, ciboulette.

Laitages : vache, brebis, chèvre. Servent à la fabrication de divers fromages.

Boissons : vin paillé, vin, vin miellé, hydromel.

  • Quelques éléments de vaisselle utilisée lors des festins :

  • Pendant le banquet on s’adonne à différents jeux :

Le jeu de l’outre demande aux joueurs de conserver leur équilibre en sautant à cloche-pied sur une énorme outre (askos) préalablement huilée. peut se jouer à plusieurs. Celui qui tient le plus longtemps sort victorieux.

Les jeux d’équilibre. La vaisselle du banquet est utilisée pour montrer la dextérité acrobatique du buveur. Kylix, oenochoé ou même amphore doivent être tenus en équilibre sur les parties les plus improbables du corps. Le défi entraîne souvent d’extravagantes positions.

Le cottabe est aussi très à la mode entre le 5ème et le 4ème siècle avant JC. Il consiste dans un premier temps au versement ou au lancer de la main droite des dernières gouttes de vin contenues par la coupe dans un bassin en métal, en invoquant la personne aimée, sans qu’une seule ne soit versée à côté. L’adresse du joueur, mais aussi l’élégance de son geste, servaient à proclamer le vainqueur.

Les jeux érotiques : le vin aidant, les jeux sexuels sont très souvent représentés dans l’iconographie des vases grecs. Les ébats mettent le plus souvent en scène des hommes. Ils peuvent parfois être très suggestifs. L’acte sexuel est représenté parfois sur les lieux même du banquet et il n’est pas rare de voir de façon répétée des hétaïres, des courtisanes, dénudées dansant ou jouant d’un instrument.

 

Chez les étrusques

Les étrusques avaient le goût des banquets fastueux. L’iconographie représente le convive semi couché, appuyé sur un ou plusieurs coussins, selon le modèle grec oriental. On y trouve musiciens et danseurs. Il est le symbole par excellence de l’appartenance à l’aristocratie.

  • Un peu de vaisselle étrusque


 

Chez les romains

Le banquet romain, le convivium, est influencé de manière générale par les manières grecques, mais aussi étrusques et italiques. La langue latine distingue le daps, mot ancien qui désigne le banquet sacré réservé aux dieux, de l’epulum, repas collectif partagé par les hommes à l’issu du sacrifice. Authentique institution de la vie publique, associative et privée c’est aussi un espace privilégié pour l’expérience bachique.

  • Au menu :

Ce sont les mêmes ingrédients que chez les grecs avec l’adjonction de quelques nouveaux épices et quelques nouveaux fruits (souvent issus de l’empire).

Céréales : sésame, semoule, levure de vin.

Viandes : escargot, langue de flamant rose, tétine de truie, paon, autruche.

Fruits : nectarine, brugnon, pastèque, citron, melon, datte, cerise.

Condiments : noix de muscade, clou de girofle.

  • La vaisselle

  • La salle à manger

Voici la reconstitution réelle avec projections en mapping vidéo d’une salle à banquet. De type klyné des grecs, soit pour un ou deux convives allongés sur des lits rectangulaires. Il existe aussi les salles à banquet à sigma où plusieurs convives sont installés sur le stibadium, un lit semi-circulaire, et sont parfois accoudés sur un coussin, le pulvinum.

L’expo marseillaise présente une étonnante découverte récente à Rome, celle de la salle à manger tournante de l’empereur Néron, la cenatio rotunda, au sommet de son palais romain, la maison dorée. Ses convives pouvaient alors festoyer et faire festin en bénéficiant d’une vue de Rome à 360°.

Néron, son buste

Le dispositif mécanique de rotation de la salle supérieure proposé par le laboratoire des sciences numériques de l’école centrale de Nantes, réalisé en impression 3D

Vue partielle sur Rome depuis la salle à manger tournante du palais

 

Aller plus loin :

On pourra agrémenter le sujet en regardant quelques films cultes :

  • Le banquet de Platon de Marco Ferreri (1989)
  • Satyricon de Federico Fellini (1969)
  • Quo Vadis de Mervyn Leroy (1951)